Quel est l’impact de toute forme d’abus sur une vie ? Que ce soit un abus psychologique ou physique ?

Toute une partie de ma vie, j’ai été abusée…

Le pire, c’est que je ne m’en suis même pas rendu compte…

Cet abus n’avait pas de forme et de texture. Pas de matière.

Ce n’était pas un abus d’un jour, via un acte. Mais un abus quotidien qui était devenu normal, puisque faisant partie de ma vie, de mon histoire.

Il était devenu moi, et moi lui. Et je l’avais même confondu avec de l’amour.

Si bien que plus tard, devenue adulte, toutes les formes de ce que je croyais être de l’amour me tuaient, sans que je m’en rende compte. Sauf que je me retrouvais irrémédiablement exsangue, et ruinée.

Tous les liens que je tissais se terminaient de la même manière.

L’autre devenait fort et moi je mourrais.

Cet abus, c’était une emprise psychologique qui petite m’a empêché d’exister, de me sentir, de me défendre.

Une espèce de pouvoir exercé sur ma personne, dont la seule issue pour l’enfant que j’étais était de faire le dos rond, de me recroqueviller, de disparaître ; ou de faire comme si de rien n’était, voire même de sourire alors que le fond de mon être aurait du rugir.

L’être sensible que j’étais, captait qu’il fallait se taire et laisser faire.

Puis l’être sensible a arrêté de sentir. Il a fini par garder les mêmes mécanismes de protection dans la fuite et le déni, qui sont devenus une seconde nature.

Tout cela, j’en ai gardé la trace jusqu’à l’âge adulte. Et, je me suis mise même à rechercher inconsciemment la même situation. La seule que je connaissais…

J’étais captivée par les abuseurs, les pervers, les manipulateurs… Et j’ai reproduit ce schéma inconscient toute une vie.

Cet abus est si insidieux… Il fait partie du quotidien.

Il n’est pas vraiment incarné, car la violence est tranquille et douce… Comme un poison qui serait distillé dans les veines, mais à petit feu… Poison dont on nous dit qu’il nous ait donné pour notre bien, parce qu’on nous aime.

Et j’ai fini par le croire, alors même que ce poison me détruisait.

Voilà ce qu’exerce l’abus sur l’identité. Il rend docile et victime. Il empêche de connecter la rage salutaire pour sortir d’une situation destructrice.

Pourtant, cette rage permettrait de poser juste le mot « non » ! Elle permettrait de dire : « Ce qu’il se passe n’est pas acceptable pour moi ! »

Mais ce « non », je ne le sentais pas. Je pensais qu’il était trop dangereux à poser. Je pensais qu’il allait me faire mourir alors qu’il était mon seul salut.

La stratégie pour m’en sortir était alors de faire des grands sourires aux abuseurs, ou de battre en retraite … alors même que mon identité était bafouée, mon territoire empiété, mes ressources spoliées.

Voilà comment on devient la proie des manipulateurs, pervers et autres abuseurs.

Mais ce n’était pas de leur faute ; mais de la mienne !

C’était de ma responsabilité, parce que je ne sentais pas ! Je ne sentais pas mes limites… Je ne sentais pas mon identité, mes racines. Je ne savais pas m’aimer et je laissais faire. Je souriais même… Je cherchais l’approbation de celui qui me détruisait, pensant que cela allait me sauver.

Sacré syndrome de Stockholm !

Un démon était tapi au fond de mon ventre et il gouvernait ma vie à mon insu.

Au fond de mon corps étaient tapis des émotions enfouies et des désirs écrasés qui auraient pu me libérer.

Mais, je ne les sentais pas ! J’en avais peur. Alors je les niais. Je les écartais si jamais elles pointaient le bout de leur nez.

Ces émotions auraient fait trop mal. Et je les pensais bien trop risquées, alors qu’elles étaient mon carburant. Elles étaient la voie vers mon identité à retrouver. Elles étaient le chemin vers ma juste place…

C’est grâce à elles que j’aurais pu sentir le mot « J’EXISTE » ; et que l’autre aurait pu capter qu’il ne pouvait pas me marcher dessus et me spolier sans me VOIR…

Car se sont les émotions qui vibrent dans le corps ; et ceux sont elles qui entourent le corps d’une protection énergétique…

La tristesse aurait pu me donner l’information que j’avais besoin d’être cajolée et nourrie ; et elle m’aurait permise de conduire des actions qui vont dans ce sens plutôt que de me coller à ceux qui me détruisaient… Mais je ne la ressentais pas.

La colère et la rage auraient pu me donner l’information que mon identité était bafouée. Cela aurait pu m’aider à poser mes limites pour partir d’une situation destructrice. Mais je ne la sentais pas.

La peur aurait pu me mettre en lien avec mon besoin de me protéger. Elle aurait pu m’aider à mettre des barrières entre moi et ceux qui abusent. Mais je ne la sentais pas.

J’étais comme vide d’émotions, inexistante… et je me plaignais que personne ne me voyait ; alors que c’était moi qui n’avais aucun amour pour moi-même, qui ne me voyais pas.

J’ai été celle-là pendant des années ! Jusqu’à ce que je sache pleurer, hurler, rire et sentir…

Mon salut a été mon corps qui m’a enfin donné les informations juste, pour poser les actes nécessaires à la naissance de mon identité bafouée !

Aujourd’hui « J’EXISTE »… Ce « j’existe » senti dans mes tripes a été le point de démarrage pour savoir m’aimer ; à aller vers les personnes qui me nourrissent.

Maintenant seulement, je vais pouvoir commencer à AIMER VRAIMENT.

Alors merci à mon corps pour ton réveil !

Aujourd’hui j’écris et j’existe !

Je m’aime et je suis aimée.

Caroline Gauthier.

Roman « Au Nom du corps » : Cliquez-ici