Qu’est-ce qui pourrait bien pousser certaines personnes à aller s’amouracher avec des pervers narcissiques ou autres abuseurs ?

Certains se posent la question et ne comprennent pas pourquoi une telle chose peut arriver… Comment des gens qui paraissent si cohérents peuvent subir de telles violences psychologiques ?

Certains peuvent juger de telles situations. Il m’est arrivé d’entendre de telles phrases : «mais pourquoi ces personnes sont restées dans des relations si violentes psychologiquement. Elles n’avaient qu’à partir ?!»

Mais si c’était si simple, cela se saurait !

Je vais vous dire pourquoi ces personnes la, restent ! Et si vous aviez vécu la même chose, je vous assure que vous feriez exactement la même chose. Alors, je vous en conjure avant de dire ou de médire, essayez de comprendre comment de telles choses peuvent se produire…

Les raisons sont souvent à aller chercher dans l’enfance,  à un moment où toutes les formes d’abus peuvent avoir des conséquences immenses sur toute une vie.

Car oui ceux qui restent dans ce genre de situations de violences psychologiques sont souvent les victimes d’abus dans l’enfance… Mais ce ne sont pas forcément des abus physiques, qui se voient et qui se conscientisent. Et c’est d’ailleurs ce qui rend les choses encore plus difficiles à guérir. Car l’insidieux, le non palpable ne peut pas se nommer, ni même se dire, et même ne pas se voir. Les violences sont senties mais pas identifiées, si bien que la personne n’arrive pas à  passer à autre chose ou  à faire le deuil de cette situation… D’où la reproduction du schéma initial à l’infini, jusqu’à ce qu’enfin l’abus soit reconnu…

Ce sont donc le plus souvent des abus qui n’ont pas de forme et de texture, et que l’on ne peut pas identifier clairement. D’où la difficulté de s’en défendre.

Et quel est l’impact de cette forme d’abus vécue enfant sur une vie ?

Certaines personnes vivent un abus depuis toujours, et elles ne s’en rendent pas vraiment compte. Ce genre d’abus devient inconscient … et de ce fait cet abus s’installe dans la structure même de la victime.

Ce sont des abus quotidiens qui deviennent normaux, puisqu’ils font partie de la vie de la personne et de son histoire.

Cette forme d’abus devient la personne, et la personne devient l’abus.

Et pire, on peut même confondre cet abus avec de l’amour.

Ce sont des petites phrases assassines distillées avec un enrobage d’amour, des discours contradictoires comme des phrases d’amour dites en même temps qu’une action de rejet posée, ou des phrases d’amour habitées par une émotion de haine …

Si bien que plus tard, devenu adulte, toutes les formes de ce que l’on croit être de l’amour peuvent tuer l’identité de l’être, sans qu’il s’en rende compte.

La personne se retrouve alors irrémédiablement exsangue, fatiguée et ruinée, mais elle ne sait pas d’où cela vient. Tout cela parce qu’elle ne se sent plus, trop habituée à sentir l’autre pour se défendre plutôt qu’elle-même..

Et tous les liens que cette personne va tisser plus tard se termineront tous irrémédiablement de la même manière.

L’autre deviendra fort et l’identité de la victime mourra..

Cet abus, vécu en premier lieu enfant, est une sorte d’emprise psychologique qui empêche souvent d’exister, de se sentir, de se défendre.

Une espèce de pouvoir exercé sur l’identité de l’enfant, dont la seule issue est de faire le dos rond, de se recroqueviller, de disparaître ; ou de faire comme si de rien n’était, voire même de sourire alors que le fond de son être devrait rugir.

Ce petit être sensible (sensibilité qui est le propre de l’enfance), capte qu’il faut se taire et il laisse faire.

Puis l’être sensible arrête de sentir. Car cela fait trop mal… Et il grandit… Il se barricade pour se protéger… Il répond aux attentes de l’abuseur pour ne pas subir ses assauts psychologiques. Et il finit par garder les mêmes mécanismes de protection dans la fuite et le déni devenu adulte. Le déni, la fuite de son senti et de sa base, deviennent une seconde nature. Il devient alors l’ombre de lui-même.

Et, cet être devenu grand recherche inconsciemment la même situation. La seule qu’il connaisse. Il se remet dans le seul lien d’amour-abus qu’il a connu, espérant inconsciemment une réparation qui ne viendra jamais

Il devient attiré par les abuseurs, les pervers, les manipulateurs… Et il reproduit ce schéma inconscient toute une vie.

Cet abus est si insidieux… Il fait partie du quotidien.

Ce abus n’est pas vraiment incarné, car la violence est tranquille et douce… C’est ce qui conduit à des dégâts immense… car la violence n’est pas palpable, pas nommée. Elle peut même prendre l’allure devenu grand, d’un beau prince charmant que tout le monde encense, alors que la victime meurt à petit feu.

Cet abus, c’est comme un poison qui serait distillé dans les veines, mais à petit feu… Poison dont il est dit qu’il ait donné pour le bien, par amour.

Et ce petit être finit par croire à cette forme d’amour, alors même que ce poison le détruit.

Voilà ce qu’exerce l’abus sur l’identité. Il rend docile et victime. Il empêche de connecter la rage salutaire pour sortir d’une situation destructrice.

Pourtant, cette rage permettrait de poser juste le mot « non » ! Elle permettrait de dire : « Ce qu’il se passe n’est pas acceptable pour moi ! »

Mais ce « non », l’adulte ne le sent pas. Ou même s’il est senti, il est cru trop dangereux à poser. Ce non est la seule chose à faire pour son salut, mais il est jugé comme trop risqué, car il conduirait selon sa croyance à la perte de l’autre qui est selon lui la seule chose qui lui reste.

La stratégie pour s’en sortir est alors de faire des grands sourires aux abuseurs, ou de battre en retraite … alors même que l’identité est bafouée, le territoire empiété, les ressources spoliées.

Voilà comment on devient la proie des manipulateurs, pervers et autres abuseurs.

Comment transformer cela ?

Ce qui est, je crois, de la responsabilité des victimes pour changer, c’est de revenir dans leurs territoires intérieurs, dans leurs corps, pour de nouveau sentir, plutôt que d’être dans les baskets des autres.

Les victimes, c’est un fait, souvent ne sentent plus leurs limites… Elles envoient des écrans de fumée pour ne pas sentir… Elles ne sentent plus leur identité, leurs racines. Elles ne savent plus s’aimer. Elles peuvent même chercher l’approbation de celui qui les détruit, pensant que cela va les sauver.

Sacré syndrome de Stockholm !

Que doit comprendre une victime :

  • Un démon est tapi au fond de son ventre et il gouverne sa vie à son insu. Au fond de son corps sont tapies des émotions enfouies et des désirs écrasés qui pourraient la libérer. Mais, elle ne les sent pas ! Elle en a peur. Alors, elle les nie. Elle les écarte si jamais elles pointent le bout de leur nez. Car ces émotions feraient trop mal. Elle les pensent bien trop risquées, alors qu’elles sont son carburant. Elles sont la voie vers son identité à retrouver. Elles sont le chemin vers sa juste place…
  • C’est grâce à elles qu’elle pourra sentir le mot « J’EXISTE » ; et que l’autre pourra capter qu’il ne peut pas lui marcher dessus et la spolier sans la VOIR…
  • Car se sont les émotions qui vibrent dans le corps ; et ceux sont elles qui entourent le corps d’une protection énergétique…

La vraie tristesse peut donner à la victime l’information qu’elle a besoin d’être cajolée et nourrie ; et elle peut lui permettre de conduire des actions qui vont dans ce sens plutôt que de se coller à ceux qui la détruisaient… Mais elle ne la ressent pas. Elle ressent de l’abattement, mais pas de la tristesse. Car la vraie tristesse libère.

La colère et la rage peuvent lui donner l’information que son identité est bafouée. Cela pourrait l’aider à poser ses limites pour partir d’une situation destructrice. Mais elle ne la ressent pas, ou pas assez fortement pour l’aider à partir. Elle capte plutôt l’émotion de l’autre et cherche à se faire apprécier de lui pour enfin être aimé et réparer le préjudicie subi enfant.

La victime devient comme vide d’émotions, inexistantes… Elle est chez l’autre plutôt que chez elle. Il lui faut retrouver ses pieds.

Son salut va passer par la réappropriation de son corps, de son énergie et de son identité pour de nouveau sentir et exister, pour ne plus être parasité.

Seul son corps lui donnera les informations justes, pour poser les actes nécessaires à la naissance de son identité bafouée !

Le « j’existe » senti dans ses tripes est le point de démarrage pour savoir s’aimer ; pour aller vers les personnes qui la nourrissent.

Le corps est sa maison. C’est son territoire. Pour ne plus être squatté, il convient de l’habiter.

 

Caroline Gauthier.

Auteur du Roman « Au Nom du corps » : Cliquez-ici