Naturopathe, psychothérapeute analytique et journaliste spécialisée dans le bien-être, Odile Chabrillac est l’auteure de plusieurs ouvrages dont le best-seller « Mon cahier Détox », et « Retrouver son énergie même quand on est à plat » (Editions Solar), « Arrêter de tout contrôler » et « Petit éloge de l’ennui » (Editions Jouvence). Elle enseigne la psychothérapie et la nutrition, et donne des formations en entreprise sur le thème du bien-être (nutrition santé, gestion du stress, pharmacie au naturel…)…

Quel que soit ce que l’on vit, il est toujours facile de trouver une explication a posteriori. Mais si l’on est honnête, si je suis honnête, j’aurai beaucoup de mal à dire pourquoi les choses se sont passées ainsi, pour moi… Difficile en effet d’expliquer pourquoi, malgré mes études de psycho, mon intérêt pour l’énergétique, malgré ma passion pour le chamanisme et diverses formes de spiritualité, le corps est toujours passé dans ma vie en premier. Je pense que j’ai eu conscience très tôt de l’importance de la sensualité, de la sexualité, de la gourmandise, de la présence incarnée. Tout ceci, passant avant tout – même si pas uniquement – par le corps. Prendre soin de mon corps a donc toujours été de l’ordre de l’évidence. J’ai découvert avec surprise au fil du temps que c’était loin d’être le cas pour tout le monde. Si l’homme, l’être humain, est loin de se réduire à sa dimension physique, pour moi, celle-ci est primordiale. Primordiale, non dans le sens de plus importante que les autres. Non, primordiale, dans le sens qu’elle doit passer en premier.

J’ai coutume d’expliquer aux gens, à mes élèves, à mes patients, que c’est comme si l’on construisait un immeuble. Le plan physique représente le premier niveau. Viennent ensuite, et selon les paradigmes, les plans énergétique, émotionnel, mental, spirituel, socio-culturel et éco-planétaire. Ils sont tous importants, vibrants, passionnants. Ils ont tous un impact les uns sur les autres, il n’y a pas de doute. Mais si votre premier niveau est branlant, tout votre édifice le sera également. Et si vous surinvestissez un étage, quel qu’il soit, vous fragiliserez l’ensemble de votre construction. Prenez donc soin de vos fondations et de votre premier niveau – votre plan physique -, c’est alors l’ensemble de votre être dans toutes ses dimensions qui en bénéficiera… Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Bien manger, mieux bouger, expérimenter toute la joie du soin de soi et de sa sensualité, constituent selon moi des préalables incontournables si l’on veut aimer, prier, vivre quoi. Vivre dans toutes ses dimensions, avec éclat.

Je viens juste de faire le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. J’ai marché plus de 1500 km à pieds, jour après jour, dans la joie (et dans la peine parfois). Ce n’est pas un exploit en soi. On rencontre sur le chemin, sur le Camino comme on dit, des personnes de 7 à 77 ans, voire davantage. Mais ce que je peux dire, c’est que c’est une école incroyable. Une école de vie (et d’amour, et de liberté aussi…). Oui, le chemin, le pèlerinage est une formidable métaphore de la vie. Et je comprends maintenant que de nombreuses religions l’aient à ce point valorisé. Pourquoi ? Car, s’il s’agit d’une aventure spirituelle et d’un acte de foi – et j’imagine qu’il en fallait de la foi au pèlerin du Moyen-âge, pour partir ainsi à la conquête de l’inconnu -, cette initiation se passe avant tout dans le corps. Et même dans nos pieds ! On dit que le pèlerin prie avec ses pieds et je peux le confirmer. Mais le pèlerin doit aussi et surtout, avant de penser à prier, prendre soin de son corps. Sinon il n’ira pas loin. Bien dormir, bien manger, se respecter, parfois se reposer, constituent ses obsessions. Car il sait, nous savons, que nous ne sommes pas là pour faire un exploit, mais pour réaliser un parcours, un projet qui nous tient à cœur. Dans la durée. Comme dans la vie, non ? En redonnant son importance réelle au corps (et au cœur dans les rencontres uniques qu’il suscite), le pèlerinage contrebalance le risque de se laisser emporter, de s’oublier au profit de son Dieu. Il nous rééquilibre, nous reverticalise. Il fait de nous un homme. Entier.

Dans la vie, c’est la même chose, il ne s’agit pas seulement de bien se porter quelques temps. Il s’agit de tenir son cap au fil des ans, pour célébrer sa vie dans toutes ses dimensions, ne passer à côté de rien, pour s’aimer et pour aimer, pour réaliser ses rêves, s’inventer et construire sa destinée. Difficile de sourire, de s’ouvrir, de rire, si l’on a mal quelque part, si l ‘on n’a pas pris suffisamment soin de soi. Je ne dis pas que l’attention au corps soit une assurance absolue contre la douleur ni même contre le malheur, ou la maladie, ou le mal-être… Je dis juste qu’il est de notre responsabilité de faire ce que l’on peut pour bien nous porter. Du mieux que l’on peut. Ensuite, la vie est suffisamment complexe, avec son lot de bonnes et de moins bonnes surprises… Mais si l’on souhaite vieillir au mieux, par exemple, nous avons réellement du pouvoir pour influencer les choses, pour les faire évoluer en notre faveur. Autant que possible. En faisant (aussi) ce qu’il faut pour notre corps, jour après jour.

Je suis naturopathe (et psychothérapeute). La naturopathie est avant tout une éducation à la santé, passant par un mode de vie sain et respectueux de l’être humain. La naturopathie dite holistique, telle que je la pratique, va chercher à tenir compte de tous les plans de l’être tel que nous les avons précédemment évoqués. Sans jamais mettre la charrue avant les bœufs : les premières choses que l’on cherche à mettre en place, à transformer, passent par le corps : alimentation personnalisée, exercice physique, respiration, massage, prise de compléments alimentaires, contacts avec la nature… Il est toujours troublant de constater l’impact global que ces principes (relativement simples) ont sur l’existence des personnes une fois qu’ils ont été adoptés. Combien ils sont porteurs pour eux (et pour nous tous) de joie, de mieux-être, d’aptitude à prendre sa vie en main dans toutes ces dimensions. J’ai, par exemple, beaucoup travaillé (et écrit un livre) sur l’influence de notre alimentation sur notre psychisme. On sait aujourd’hui, après avoir pensé le contraire pendant des décennies, à quel point notre alimentation peut aggraver ou atténuer une dépression, ou faire changer le QI de quelqu’un. Ce sont des choses vraiment étonnantes. Oui, nous sommes (aussi) ce que nous mangeons. A un point que nous n’imaginons probablement pas, ni vous, ni moi.

Lors d’un jeûne, ou d’une cure détox, on peut ainsi constater qu’en éliminant certains « miasmes » physiques, on laisse également derrière soi bien des souffrances émotionnelles, des histoires de notre histoire qui nous collaient à la peau et que l’on avait du mal à « digérer ». En allégeant son corps, on allège également son cœur et son âme. Sans le faire exprès ! Ca se fait tout seul. Loin de moi l’idée de penser que ce soit simple : un jeûne par exemple (tout comme un pèlerinage d’ailleurs) constitue un véritable engagement physique et psychique. Il n’est pas facile de tenir la distance. On a faim (surtout au début), on dort mal, notre corps est véritablement déboussolé… C’est pourquoi, je préconise d’ailleurs de vivre ce type d’expérience en groupe, car ici comme ailleurs le soutien des autres nous permet de tenir bon. Mais ensuite, quel soulagement, quelle légèreté, quelle étrange sensation d’avoir passé un cap, monté un marche. D’avoir laissé derrière soi quelques unes de ces valises qui nous pesaient, nous encombraient, nous entravaient… Ouf !

Je pourrais évoquer, pour me justifier, toutes ces études récentes qui montrent qu’il existe dans nos intestins des neurotransmetteurs identiques à ceux de notre cerveau, je pourrai vous rappeler que toutes les grandes médecines de par le monde recommandent la pratique de lavement (et en particulier en cas de problèmes psychologiques), de l’activité physique, de la diète, je pourrai vous faire connaître ces études qui se multiplient et qui vont TOUTES dans le même sens, soulignant par exemple l’impact néfaste du sucre sur notre santé et sur notre moral (je parle du sucre industriel et non bien-sûr des glucides absolument indispensables à notre vie, car ils constituent le carburant de base de notre corps), je pourrai, je pourrai… Mais ce serait solliciter votre mental bien plus que le reste… Comprendre l’importance du corps ne devrait pouvoir se sentir que dans son corps et non affalé sur son canapé en train de dévorer des Kinder Bueno et de lire cet article sur sa tablette tactile!

En effet, l’autre élément qui me trouble dans ma pratique est de constater à quel point les gens ont des compétences de plus en plus pointues concernant le bien-être (même si celles-ci sont souvent un amalgame de connaissances réelles et de pseudo-vérités tout à fait erronées souvent issues de la publicité). Et à quel point ils ne les mettent pas en pratique. Le passage à l’action est infiniment complexe. Et pourtant c’est lui qui nous rend heureux, c’est lui qui nous enchante. L’expérimentation, l’expérience ont toujours raison. On peut faire erreur, fausse route, parvenir à des impasses, enrager, retomber dans nos anciens schémas. Mais je pense qu’il vaut mieux se tromper avec enthousiasme, que de ne rien faire. Alors, qu’est-ce que vous attendez ?

Qu’est-ce que vous attendez pour renoncer à ces aliments qui n’en sont plus à force d’industrialisation (faux beurre, faux sucres, ajouts d’additifs en tous genres) ? Qu’est-ce que vous attendez pour passer au vert (consommation quotidienne de légumes verts, immersion dans la nature dès que l’on peut) ? Pour manger enfin des fruits et légumes (non pas 5, mais 10 environ par jour, car telle est normalement la règle si l’on ne l’avait édulcorée afin de nous rassurer…) ? Pour vous mettre en mouvement et célébrer ainsi l’essence même du vivant (pour être en santé, nous devrions en effet nous bouger 3 fois 1h30 par semaine) ? Qu’est-ce que vous attendez pour gérer votre stress en douceur ? Pour vous faire du bien, vraiment (aller au sauna, au hammam, vous promener, vous faire masser, ne rien faire aussi…) ? Et voir ensuite ce qui vous convient, et ce qui ne vous convient pas. Car les règles collectives sont toujours inadaptées à nos réalités individuelles. Et c’est bien ainsi. Il est de notre responsabilité d’inventer une vie à nos mesures, à la hauteur de notre joie. Une vie qui nous convienne et nous apaise. Une vie dans laquelle on se sente bien. Enfin.

ODILE CHABRILLAC

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